L’impressionnisme et la mode, une exposition franco-américaine
Organisée par le musée d’Orsay à Paris, le Metropolitan Museum of Art de New York et The Art Institute de Chicago, l’exposition L’impressionnisme et la mode s’annonce comme l’un des grands événements culturels de la rentrée parisienne et de l’année prochaine aux Etats-Unis. Fructueuse idée en effet d’associer deux des points forts français qui suscitent le plus d’engouement à l’étranger !
La mode française et l’impressionnisme sont particulièrement prisés partout dans le monde, et aux Etats-Unis en particulier. Il n’est donc pas étonnant que la demande d’une exposition les réunissant soit venue d’outre-Atlantique, de l’Art Institute of Chicago plus précisément. Le musée d’Orsay, principal dépositaire parisien des œuvres des Impressionnistes, a répondu oui sans hésitation. En France, toutes les expositions consacrées à ces artistes ont été d’énormes succès. L’an dernier, Paris au temps des impressionnistes, à L’Hôtel de Ville, a reçu 150 000 visiteurs. Cette année, l’exposition Berthe Morisot impressionniste, au musée Marmottan Monet, a été prolongée en raison de l’affluence. Et l’on se souvient encore des files d’attente provoquées par Cézanne et Pissarro à Orsay, Renoir puis Monet au Grand Palais - des expositions dans lesquelles différents musées américains étaient d’ailleurs déjà partie prenante.
Préparée depuis 2009, la nouvelle exposition, L’impressionnisme et la mode, au musée d’Orsay du 25 septembre au 20 janvier, voyagera ensuite à New York, au Metropolitan Museum of Art (MET) du 19 février au 27 mai 2013 et à l’Art Institut of Chicago du 30 juin ou 22 septembre 2013. Elle réunit des toiles du musée d’Orsay, bien sûr, et d’autres venues des musées américains partenaires, mais également d’ailleurs, comme Nana de Manet prêtée par la Hamburger Kunsthalle (Allemagne). Autre prêt exceptionnel, La Loge de Renoir, appartenant au Courtauld Institute of Art de Londres. Chicago envoie notamment le superbe Jour de pluie à Paris de Caillebotte et le MET Le Portrait de Mme Charpentier et de ses enfants, un événement puisqu’on n’avait pas vu ce tableau de Renoir en France depuis quarante ans.
Soucieux de rendre compte de la vie « moderne », les peintres impressionnistes ont saisi le citadin dans ses activités, professionnelles et ludiques, à la ville comme à la campagne. Monet et Degas notamment sont de parfaites illustrations du genre parisien du « flâneur », fin et désinvolte observateur de ses contemporains. Le portrait devient l’instantané d’un homme ou d’une femme dans son cadre familier.
Ce faisant, les Impressionnistes ont rendu compte de la mode vestimentaire des années 1860-1880, alors en pleine évolution. « Cette époque dynamique soutient l’essor du commerce par l’ouverture de grands magasins, le foisonnement des griffes, la multiplication des manufactures textiles, la création de nombreuses maisons de couture célèbres à l’étranger notamment auprès de la riche clientèle américaine, rappelle Françoise Tétart-Vittu, conseillère scientifique de l’exposition pour les costumes. Les Impressionnistes, issus de la bourgeoisie, peignent leurs familles, leurs amis et leurs amies, lesquelles, souvent modistes ou couturières, créaient leurs toilettes, ou, pour les plus fortunées, les commandaient chez les meilleurs couturiers ».
Cet aspect de l’exposition a été conçu avec la participation du musée des Arts décoratifs et du musée de la Mode de la Ville de Paris, qui ont fourni la moitié des costumes présentés. L’autre moitié provient de collections privées ou de musées de province dédiés au costume comme ceux de Château-Chinon, Argenton-sur-Creuse ou Vesoul. Le contexte est évoqué par des gravures, des journaux de mode et des photographies tirées du riche Fonds Disdéri du musée d’Orsay. « Costumes et accessoires, chapeaux, chaussures, sont répartis dans des salles thématiques, « réception », « plein air » », indique Françoise Tétart-Vittu, qui précise qu’il ne s’agit pas de ceux représentés sur les tableaux ! On ne verra donc pas, à côté des œuvres, les robes blanches portées par Berthe Morisot sur Le Balcon de Manet ou par Suzanne Valadon dans la Danse à la ville de Renoir, pas plus que le costume du marquis de Miramon brossé par Tissot ou ceux des personnages du Déjeuner sur l’herbe de Monet. Mais il y aura tout ce qu’il faut de jupes qui traînent, de robes courtes à tirettes, de poufs retroussés et puis, tout de même, la vraie robe d’été à rayures et à pois portée par Prospérie de Fleury dans le tableau de son mari Albert Bartholomé Dans la serre… « La confrontation entre peinture et mode s’annonce intéressante, avec dans chaque section une ou plusieurs robes, ainsi que des accessoires en rapport avec les tableaux », remarque Philippe Thiebaut, conservateur général à Orsay et commissaire de l’exposition, qui tient à souligner que « la mode masculine est également présente ! ».
Il suffirait presque de parcourir la liste des sponsors, LVMH, Christian Dior, pour se convaincre qu’on a bien affaire à la quintessence de l’élégance et de l’esprit français… Et avec le décorateur d’opéra Robert Carsen comme scénographe et directeur artistique, nul doute que l’ensemble sera spectaculaire et glamour à souhait. Documentaire, soirées défilé et cinéma, café littéraire, concert et spectacle, les manifestations annexes achèveront de transformer cette exposition en un événement qui ne peut qu’attirer les foules, à Paris comme aux Etats-Unis.
Sylvie Thomas